Parce qu’elle représente environ un quart des émissions de gaz à effet de serre des ménages en France, l’alimentation fait partie des principaux leviers à activer pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050.
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Dans le cadre de son étude « Transition(s) 2050 », qui explore différents scénarios pour atteindre la neutralité carbone du pays en 2050, l’ADEME a analysé la part que pouvait y prendre le système alimentaire. « Quelle que soit la trajectoire choisie, nous ne pouvons pas nous passer de changements importants dans la taille et la composition de nos assiettes, indique Antoine Pierart, ingénieur Sols et Prospective à l’ADEME. En France, en moyenne, nous mangeons trop et mal, souvent au détriment de la qualité et de l’environnement. Et ce alors que la part de ceux qui n’ont pas les moyens de se nourrir augmente.» Deux tiers de l’empreinte carbone de nos repas sont liés à la production agricole. En divisant par deux ou trois la consommation de viande, en augmentant la part de l’agriculture biologique à 50 ou 70 %, en réduisant le gaspillage alimentaire de moitié et en privilégiant les denrées peu transformées, locales et de saison, il serait possible d’arriver à l’objectif fixé par la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) : diviser par deux les émissions liées à l’agriculture d’ici 2050. Cela tout en préservant la biodiversité et les écosystèmes. Si nous n’y parvenons pas, il faut espérer que des technologies encore incertaines, de capture et de stockage du CO2, aboutiront à temps pour compenser des efforts insuffisants.
Santé et environnement, même régime
L’assiette durable n’est pas seulement bonne pour l’environnement. Elle répond aussi aux recommandations du Plan national nutrition santé (PNNS) : plus de céréales, fruits, légumes et légumes secs, moins de charcuterie et de viande, en privilégiant la qualité sur la quantité…. Par ailleurs, le prix des denrées locales et de saison, moins dépendantes des coûts de transport et de chauffage des serres, est en général moins touché par l’inflation. Certes, les produits bio, ou sous labels de qualité, sont souvent plus chers, mais maîtriser son budget reste possible en cuisinant maison plutôt qu’en achetant des produits transformés, mais surtout en consommant des produits de saisons et en diminuant la viande et le poisson (les produits souvent les plus chers du caddie). La lutte contre le gaspillage alimentaire permet aussi de réaliser des économies. Les avantages d’un tel changement de régime sont nombreux : on mange au même prix en protégeant sa santé et l’environnement. Pourtant, la transition n’est pas aussi rapide qu’attendu. « Les citoyens sont soumis en permanence à des images et promotions qui les incitent à acheter toujours plus, et pas forcément ce qu’il y a de meilleur pour eux et la planète, regrette Antoine Pierart. Nous appelons donc la publicité et le marketing à adopter une communication plus responsable.»
Un autre argument pourrait convaincre les politiques de soutenir l’adoption de régimes alimentaires plus durables. L’évolution de la demande, en allant vers une alimentation plus végétale et des viandes de qualité, pourrait permettre la réimplantation sur le territoire de filières de protéines végétales telles que les légumes secs, de certains fruits et légumes, le développement de pratiques plus agro-écologiques, ainsi éventuellement que de filières non alimentaires créatrices de valeurs.
Reconnecter agriculture et alimentation
Les consommateurs, en changeant leurs habitudes d’achat, ont le pouvoir d’influer sur la chaîne de production. Mais « les agriculteurs ne doivent pas attendre que la demande soit forte pour entamer leur transition écologique. Les deux extrémités du système ne peuvent évoluer l’une sans l’autre, insiste Sarah Martin, cheffe du service Agriculture Forêts et Alimentation de l’ADEME. Si les agriculteurs se mettent massivement au bio, mais que les consommateurs n’achètent pas ce type de produits, il y a un souci. À l’inverse, cela ne sert à rien de dire aux gens de manger plus de protéines végétales cultivées localement, s’il n’y a personne pour en proposer. » En plus d’encourager leurs habitants et cantines à végétaliser leurs menus, et les agriculteurs à faire évoluer leurs pratiques, de plus en plus de territoires favorisent le rapprochement entre tous ces acteurs (voir Zoom et Entretiens croisés p. 9 et 10). Les actualités des dernières années ont achevé de les convaincre : la Covid-19 puis la guerre en Ukraine, la multiplication des sécheresses et autres aléas climatiques ont montré la nécessité d’améliorer la résilience des territoires et leur souveraineté sur les denrées les plus courantes. Ils peuvent compter, pour y arriver, sur les ressources de l’ADEME.
Aides à la décision
L’ADEME contribue depuis longtemps à encourager cette transition agricole et alimentaire. « Nous produisons des connaissances, menons des actions de sensibilisation, d’information et de formation auprès des acteurs concernés, rappelle Alba Departe, coordinatrice Alimentation durable à l’ADEME. Nous pilotons des appels d’offres, proposons un certain nombre d’aides financières et d’outils d’aide à la décision. » Citons par exemple le Bon Diagnostic Carbone pour les exploitants agricoles, l’outil ClimAgri qui facilite le bilan énergie-GES des territoires agricoles, la base de données Agribalyse sur laquelle les entreprises agroalimentaires peuvent s’appuyer pour leurs analyses de cycle de vie et démarches d’écoconception, ou encore les expérimentations menées depuis 2020 pour mettre en œuvre un affichage environnemental harmonisé, lisible et transparent sur les produits alimentaires.
L’ADEME aide les régions à faire leur diagnostic
Face à la multiplication des aléas (climatiques, économiques, géopolitiques…), les régions cherchent à améliorer leur résilience et à retrouver leur souveraineté alimentaire, tout en contribuant à l’objectif de neutralité carbone. Trois d’entre elles, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France et Nouvelle-Aquitaine, ont ainsi mené avec l’ADEME les premières études diagnostiques de systèmes alimentaires à l’échelle de régions. Et trois autres s’apprêtent à faire de même : Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes et Normandie.
Plus d’infos :
Une alimentation plus durable en 10 questions
Afin d’aider les citoyens à mieux comprendre l’impact de leurs choix alimentaires, l’ADEME met à leur disposition une brochure qui répond à leurs principales questions, incluant des liens vers des livrets de recettes de saison, anti-gaspi, zéro déchet ou à base de légumes secs.
Plus d’infos : Une alimentation plus durable en 10 questions